Dans une actualité angoissante, souvent violente, il reste heureusement des coins de ciel bleu et des exemples inspirants. Celui de Betty et de Paul Tibérini en fait partie. A "septante-cinq et septante-six ans", s'amusent-ils à préciser, les Drômois dynamiques viennent de réaliser ce que beaucoup qualifieraient d'exploit, même si pour eux, il n'en est rien. Pendant 34 jours, du 18 mai au 20 juin, ils ont avalé 1 740 km pour venir retrouver leur famille à Ligné, à la force des cuisses et des mollets. Leur seule contrainte était dictée par un souci : "On devait arriver après le bac d'Odessa, notre petite-fille de 17 ans. On est arrivés juste après."
Partis de Romans-sur-Isère où ils résident, ces amoureux de la nature n'ont pas traversé la France par le chemin le plus court. Privilégiant les pistes cyclables "parce qu'elles sont plus sûres" que les routes secondaires, ils ont mis cap au sud en direction de Sète, avant d'obliquer vers Toulouse, Agen, Bordeaux, puis La Rochelle et Nantes, à raison de 60 km par jour et sur des vélos "classiques, sans assistance électrique", pourtant lestés de quatre sacoches d'une cinquantaine de kilos. Le poids à prévoir avec la tente, la popote, le réchaud, des vêtements de pluie et quelques changes. "Pour la nourriture, hormis une petite réserve, on s'est approvisionné dans les villages quand on avait la chance de tomber sur une supérette", indique Paul, les jambes bronzées... au-dessus des genoux !
"On a pris tout notre temps pour apprécier le trajet"
En parlant de jambes, les leurs ont tenu le choc, malgré quelques tiraillements causés par l'arthrose, "un problème de vieux", sourit l'ancien professeur de physique, qui assure que "plus on bouge et plus ça va".
Pour ce périple, l'objectif était clair : "Etre dans la performance, ce n'est pas pour nous. On a pris tout notre temps pour apprécier le trajet, être en osmose avec la nature et prendre du plaisir", explique Betty, une employée de mairie à la retraite. "Surtout, partager la même passion ensemble permet de passer les difficultés plus facilement", poursuit Paul, qui n'est pas près d'oublier une "pente exceptionnelle à 18 %" du côté de Blaye, en Gironde, au nom prédestiné de "côte de tire cul" ! "Quand ça monte comme ça, il faut se battre", poursuit-il en rappelant tous les bons moments agréables comme le chant des oiseaux, les parfums des fleurs, l'odeur des genêts, sans oublier les étoiles à la belle étoile et les grenouilles qui coassent.
"Si nous on le fait, d'autres peuvent le faire"
Sur la route aussi, tout s'est bien passé. "On a eu aucune crevaison et globalement, on a trouvé les voitures très respectueuses, notamment à Nantes, contrairement au sud où elles n'hésitent pas à doubler." Soit par intérêt, soit par curiosité, certains leur ont posé des questions et souvent félicités : "Combien de fois on nous a dit "respect", "bravo", "courage" ou "super" ", se souvient Betty, qui réentend une dame lancer : "Superbe paquetage. C'est net, c'est carré, c'est beau."
Présents encore quelques jours, Betty et Paul ignorent encore s'ils rentreront chez eux comme ils sont venus. Si l'itinéraire de la Loire à vélo les tente, ils hésitent à cause de la météo, surtout en cas de chaleur. "On a le temps d'y réfléchir, mais une chose est sûre, on ne prendra pas le train. Avec nos vélos, c'est impossible", estime Paul. Ce qui est possible, en revanche, c'est de suivre leur exemple qui est tout sauf un exploit selon eux. "L'exploit, enchaîne Betty, c'est se lever tous les matins à 6h dans la tente et de se mettre à quatre pattes pour sortir. Si nous, on le fait, d'autres peuvent le faire. Il suffit de le vouloir et franchement, la France est vraiment un beau pays."
L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.